 |
De l'autre côté de l'écritoire |
Un homme dangereux d’
Émilie Frèche (Stock, 284 pages, 2015)
Incipit :
Nous n'avons pas échappé aux statistiques, comme quatre-vingts pour cent des couples, après quinze ans de vie commune et deux enfants, Adam et moi ne couchions plus jamais ensemble.
Une femme juive a qui tout réussi, métier, famille, amour, s'entiche d'un homme antisémite. Une relation toxique à laquelle elle va tenter d'échapper.
Je ne crois
pas à la relation amoureuse entre Émilie (l'héroïne) et Benoît (l'amant toxique), l'auteur l'avoue
elle-même page 226 ("../.. tel quel, le lecteur n'arriverait jamais à
comprendre comment une femme pouvait se retrouver sous sa dépendance."),
alors que vers la fin la fiction est totalement assumée. Ce manque de
crédibilité est le point faible du livre, ce qui pose un gros souci vue
que tout tourne autour de cette relation délétère.Et puis les remarques
du personnage principal sont parfois étonnantes (p. 157 "../.. un type
auquel il espérait piquer sa femme était assez con pour le lire ... J'en
ai voulu à Adam de ne pas l'avoir compris", de la part d'un personnage
qui trompe son mari, lui ment, se fout carrément de lui ... c'est assez
gonflé.)
Il y a un côté
Alice au travers du miroir, et un mélange entre fiction, auto-fiction, roman, réalité, surtout vers la fin, et cela et le point fort du livre, mais cela ne compense pas suffisamment pour que je recommande cette lecture. De plus le livre dans le livre, la mise en abyme, le pouvoir des mots bla-bla-bla c'est de moins en moins original voire commence à me saouler. Faut-il souffrir pour écrire ? Faut-il écrire pour ne plus souffrir ? Bof, pareil. Le lien/parallèle avec
Dumontet est tout de même intéressant (p. 145 puis vers la fin).
J'ai appris l'existence de ce livre à l'émission
Répliques de
Finkielkraut sur
France Culture. J'étais en voiture, j'ai pris l'émission en court, je n'ai même pas pu suivre la fin, mais le point qui m'avait attiré vers ce livre, c'est qu'il parlait de l'émission de
Taddeï, sur l’antisémitisme, où l'auteur avait été invitée ainsi que
Marc-Edouard Nabe. C'est en effectuant quelques recherches sur ce dernier que j'ai voulu en savoir plus finalement. L'excuse curieuse de
Taddeï (
Marc Edouard Nabe n'a "jamais été condamné pour antisémitisme", mais il ne dit pas qu'il n'est pas antisémite. Le lien personnel entre Nabe et Taddeï éclaire mieux sa position), le côté sulfureux, ignoble de
Nabe (sa revue
Patience est bien pire que les tweets de
Marine Le Pen (l'envoi de photos sur les atrocités du proto-état islamique), avec
la complaisance des Inrocks, entre autre). Je pensais en apprendre plus dans ce roman, en fait moins que ce qui a été dit dans l'émission de
Finkielkraut, par exemple la raison pour laquelle
Nabe et
Soral ne s'entendent plus (ce dernier est complotiste, pour lui le 11 septembre c'est la CIA etc). Tout simplement parce que
Nabe souhaite que soit reconnu à
Al Quaeda la paternité des attentats. Il a été reproché à
Richard Millet le titre ambigu (
Éloge littéraire d'Anders Breivik) voire son soutien pour l'assassin
Anders Breivik ? Que dire alors d'
Une lueur d'espoir de
Nabe avec comme fond les tours détruites du
World Trade Center ? De son soutien en filigrane au terrorisme ? Consternant. Des dérèglements du monde
Amin Maalouf a une proposition
bien plus intéressante et constructive.
Je reste dubitatif sur l'intérêt d'
Un homme dangereux. Se lit bien mais sans plus. Déçu car j'en attendais vraisemblablement autre chose. Toutefois je ne regrette pas de l'avoir lu car il touche à des sujets et des personnes réelles de notre temps.
Note : AA